Nicolas Sarkozy, du fichage policier des musulmans pratiquants aux réunions secrètes sur l’islam


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Pour retourner à l’Elysée, Nicolas Sarkozy ressort la carte de l’islamophobie afin d’attirer les électeurs du Front national. Plus qu’une tactique conjoncturelle, la stigmatisation des musulmans fait partie intégrante de la stratégie politique menée depuis huit ans par l’ancien chef d’Etat. Illustration.

Le 04.06.2015 à 14h31

Identité nationale, burqa, refus du voile à l’université, menus de susbstitution dans les cantines, prières de rue, nounous voilées, réservations de piscine, obsession chronique au sujet de Tariq Ramadan, mise en avant d’Hassen Chalghoumi, expulsion en fanfare d’imams marginaux, entre autres gadgets : l’islam comme objet de terreur exotique a considérablement été exploité par les pouvoirs publics, la majorité présidentielle ou l’opposition depuis 2007. Nombre de commentateurs indulgents y ont vu une simple volonté électoraliste de la part -notamment- de l’ex-UMP, désireuse de récupérer les voix du Front national. C’est ignorer pourtant un aspect fondamental -et jamais débattu- de la politique mise en oeuvre par Nicolas Sarkozy durant son mandat : le fichage policier d’une part croissante de la population musulmane française.

Une information édifiante figure en ce sens dans un ouvrage publié en 2012 et intitulé L’espion du président. La brillante enquête menée par les journalistes Olivia Recasens, Didier Hassoux et Christophe Labbé confirme ce qui faisait auparavant l’objet d’une rumeur dans les cercles associatifs musulmans. Extrait issu du chapitre 18:

Cristina, fichier de la DCRI, recense tous ceux qui peuvent de près ou de loin porter atteinte à la sécurité du territoire. Concernant la communauté musulmane, Cristina est doté d’un véritabe estomac d’autruche, avalant un peu tout et n’importe qui. Chaque année, les départs à La Mecque, suivis avec attention par les antennes DCRI des aéroports parisiens, sont l’occasion d’y faire entrer de nouveaux noms. Parmi ces pélerins, beaucoup n’ont aucun lien avec un quelconque islamisme radical. La « répression préventive », c’est le leimotiv du Squale en matière de terrorisme.

Police politique

Le « Squale » était le surnom prêté à Bernard Squarcini, ex-responsable de la Direction centrale du renseignement intérieur (et proche de l’ancien président du CRIF). Cette structure policière (ex-DCRI, désormais remplacée par la DGSI) est née en 2008 à la suite de la fusion entre les RG et la DST. Quant au fichier Cristina, celui-ci constitue la base de données, classée « secret-défense« , dans laquelle figurent les noms des dizaines de milliers de Français, soupçonnés de pouvoir porter atteinte « aux intérêts fondamentaux de la Nation ». Son domaine spécifique et officiel : la lutte contre le terrorisme associée au contre-espionnage. Sur un plan pratique, le fichier Cristina, amplifiant la collecte des renseignements dévolus depuis 1997 à la DST, est essentiellement géré par ce qui était dénommé -au sein de l’ancienne DCRI- la « sous-division R ». Ce groupe de policiers, alors dirigé par le commissaire divisionnaire Stéphane Tijardovic, opère dans une opacité totale. Comme le révèle L’espion du président, ils sont également habilités, sans contrôle d’une autorité indépendante, à mettre sur écoute, par téléphone ou internet, quiconque leur paraîtra susceptible, en raison de sa « radicalité » (terme-prétexte nébuleux par excellence), de devoir faire l’objet d’une surveillance particulière. De même, ils pratiquent au besoin le « siphonnage » à distance des disques durs ou la sonorisation des appartements après avoir commis une effraction indolore de la porte d’entrée. Leur règle selon les auteurs de l’enquête : le « pas vu, pas pris ». 

Précision d’actualité : la loi Renseignement, voulue par Manuel Valls et en cours d’adoption par le Parlement, vient essentiellement entériner, couvrir et valider ces pratiques illégales.

Le chapitre 18 de l’ouvrage révèle en détail l’instrumentalisation politique de l’anti-terrorisme : lorsqu’il s’agissait ainsi d’étouffer une affaire compromettante pour l’Élysée, l’ex-patron de la DCRI savait pratiquer la diversion de médias complaisants en faisant « fuiter » tel ou tel pseudo-danger imminent associé à l’islamisme. Quant au fichier Cristina, instauré depuis 2008 et emblématique des dérives du pouvoir, il est le fruit de la rencontre entre le sarkozysme ultra-sécuritaire aux penchants islamophobes et la haute technologie dédiée à la surveillance policière. Contrairement au fichier Edvige, largement débattu en raison de son intrusion dans la vie privée des militants syndicaux ou associatifs, le fichier Cristina, plus focalisé sur la menace « islamo-terroriste », n’a pas fait l’objet d’une controverse depuis sa mise en place.

Davantage que le discours relatif au halal ou à la burqa, cette inscription policière de plus en plus de musulmans français, devenus soudainement suspects en raison de leur pèlerinage à La Mecque, en dit long sur le clan sarkozyste. Un groupe d’hommes et de femmes -digne par ses pratiques secrètes d’un cartel- qui n’hésitait pourtant pas à pousser des cris d’orfraie lorsque les éditorialistes de l’Humanité dénonçaient le pétainisme rampant de Nicolas Sarkozy. Un parallèle historique est pourtant envisageable : le dernier homme d’État a avoir fiché à grande échelle des individus en raison de leur identité religieuse se nommait précisément Philippe Pétain.

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